La possibilité d'un PPT : Nathan Hill - Bien-être
C’est quoi l’idée ?
Celui qui lit, aura vécu 5000 ans ; la lecture est une immortalité en sens inverse ; la littérature et la vie c’est pareil. Le métier de planneur stratégique en agence de publicité consiste à connaître les gens ; à vivre d’autres vies que la sienne.
Je suis payé pour vendre des idées, souvent celles des autres, la forme étant le fond qui remonte à la surface elles doivent être bien troussées et présentées non pas comme une découverte mais comme la redécouverte de celles d’illustres individus avant nous.
Rien n’est de moi dans les lignes précédentes, lire sert à ça, à copier et à coller.
Avant, il faut collecter et c’est ce que je fais, chaque lundi à 13h45 dans cette newsletter ; pour mieux les retrouver au besoin.
Père ManQ, raconte-nous une histoire.
On passe directement des deux éditions numérotées 50 à la 52, j’évite la zone 51 et ses petits hommes verres à pieds.
Tout le monde semble aimer le nouveau Nathan Hill, j’en attendais un peu plus mais objectivement c’est remarquablement bien écrit. Donnez lui le Pulitzer.
Au centre du livre il y a une théorie inédite, ou seulement inconnue de moi, sur le fonctionnement d’un placebo. Placebos qui peuvent être des pilules, des médecines douces ou encore des certitudes.
Les théories du complot, par exemple, seraient une forme de protection face aux agressions du monde.
Makes sens.
Le corps serait capable de tout soigner seul. Comme c’est très couteux en énergie, il conserve son énergie pour des cas d’extrêmes urgences vitales (la menace d’un lion affamé, famines…) et laisse courir ce qu’il considère comme des petits maux : rhume, inflammation, dépression, anxiété etc.
Si le cerveau n’a pas évolué depuis le paléolithique, les menaces vitales, elles, ont changé.
La surcharge d’information est le nouveau lion affamé mais le cerveau ne le perçoit pas et nous laisse gérer notre anxiété. A coup de placébo et de certitudes.
Il y a aussi un passage qui démonte la célèbre étude du “tu préfères 10 francs demain ou 20 francs dans une semaine” qui concluait que ceux capables d’attendre une semaine le double de la somme seraient mieux équipé intellectuellement pour la vie.
Mais plus important encore, la réponse à la question que tout le monde s’est déjà posée : pourquoi on récupère mieux d’un rhume en été qu’en hiver ?
Je vous mets tout ça ci-dessous.
Peace.
Citations et idées remarquables
Les auteurs de l'étude originale étaient arrivés à la conclusion que les enfants capables de résister un quart d'heure à l'envie de manger la guimauve réussissaient mieux dans la vie parce qu'ils contrôlaient mieux leurs impulsions et savaient différer leur gratification. Mais cette nouvelle étude, qui prenait en compte une série de variables sous-jacentes, parvenait quant à elle à une tout autre conclusion : les enfants capables d'attendre ne faisaient pas preuve d'un plus grand contrôle d'eux-mêmes. Non, ils étaient simplement riches. Ayant intégré qu'il leur suffirait de vouloir de la guimauve pour en avoir, ils pouvaient se permettre la patience. Et si les autres s'emparaient de la guimauve sans attendre, ce n'était pas dû à leur impulsivité mais au fait que lorsqu'on grandissait dans un environnement où le manque était chronique, on n'allait pas prendre le risque de refuser ce qui nous était offert.
Mais je me suis laissé convaincre — c’est l’une des raisons de votre présence ici, comme spécialiste de l’âme humaine — qu’il y a plus de différences entre deux moments du même homme qu’entre deux hommes.
Sanborne avait raison : la certitude n'était qu'une histoire que l'esprit fabriquait pour se défendre contre la douleur de vivre. Ce qui impliquait, presque par définition, que cette même certitude était une façon d'éviter de vivre. On pouvait choisir d'être certain, ou on pouvait choisir d'être en vie.
Et elle n'était certaine que d'une chose : entre nous et le monde, il y avait un million d'histoires, et si l'on ne savait pas lesquelles étaient vraies, alors autant essayer les plus humaines, les plus généreuses, les plus belles, les plus chargées d'amour.
Avez-vous vu ces photos que les gens prennent de la tour penchée de Pise ? Celles où ils donnent l'impression de l'empêcher de tomber ?
⁃ Oui.
Cette illusion ne fonctionne pour l'observateur que sous un angle bien précis. Il suffit d'un petit pas vers la gauche ou vers la droite pour qu'elle ne tienne plus. Et je crois que c'est ce que font les gens la plupart du temps, dans la vie. Ils trouvent un point de vue sur le monde qui correspond au leur, un endroit douillet, et s'y plantent pour ne plus en bouger. Parce que s'ils bougeaient, leurs certitudes et la sécurité qu'ils ressentent se désagrégeraient, une perspective effrayante et douloureuse. Les gens préfèrent donc leurs illusions - que le monde est une simulation, que l'acupuncture a un effet, que les cures détoxifiantes fonctionnent, ou qu'Ebola a été créé par le gouvernement.
On pourrait dire que la certitude est finalement le côté face de la douleur - ce à quoi la douleur ressemble quand elle est réfléchie par un miroir déformant. Quand je vois des gens sur Facebook exprimer avec violence leurs certitudes inflexibles sur telle ou telle question politique, je me dis qu'en réalité ils sont en train de dire Je souffre, et tout le monde s'en fiche.
⁃ Douleur sans cause physique aigue, douleur ressentie que le corps pourrait soulager s'il le voulait - voilà le genre de douleur qui répond le mieux au placebo. Et pourquoi cela ? Eh bien, la réponse est peut-être tout bêtement biologique : c'est coûteux. Métaboliquement coûteux.
Traiter la douleur, l'infection ou l'inflammation de l'intérieur est en réalité très coûteux d'un point de vue calorique.
Mobiliser les mécanismes immunitaires du corps, les endorphines, les opioïdes naturels, la serotonine... tout ça exige une quantité énorme d'énergie. Saviez-vous, par exemple, que la réponse immunitaire du corps au rhume est bien plus faible l'hiver que l'été?
⁃ Non, je l'ignorais.
Le cerveau perçoit que les jours sont plus courts, il sent le manque de lumière, les températures froides et il conclut : saison de disette. Il mobilise donc moins d'énergie pour combattre les rhumes que l'été, saison d'abondance.
D'où le fait que, l'hiver, les rhumes ont tendance à durer, parce que le cerveau se montre pingre avec ses ressources, ayant évolué dans des conditions où la vie était rude et où l'on manquait de tout.
⁃ Ce que le placebo nous offre, c'est l'illusion de la certitude. Il nous propose un récit qui, une fois qu'on y adhère, pousse le corps à mettre en branle ses propres processus naturels. Le placebo ne nous guérit pas il crée l'émotion nécessaire pour nous guérir nous-mêmes. Et cette émotion, c'est la certitude.
— Un corps qui a faim ne gâche pas de calories à soigner un rhume. — Et entouré de lions affamés, il va dépenser sa précieuse énergie à courir, pas à soigner son intestin irritable. Le cerveau – qui opère toujours à partir d’une simulation du paléolithique posée sur notre monde du XXIe siècle – se livre à une analyse coûts-bénéfices : il ne dépensera l’énergie nécessaire à la guérison que lorsqu’il sera sûr d’en avoir en quantité suffisante pour le reste, quand il sera certain qu’on ne risque rien. — Mais on ne risque rien. Pas de lion, pas de famine.
— D’accord, mais est-ce vraiment ainsi qu’on le ressent, de l’intérieur ? Vous vous en sentez si sûre ? Vous vous sentez tout à fait à l’abri du danger ? Si une émotion n’est que le nom que nous donnons à des sensations physiques, comment décririez-vous une expérience de confiance et de sécurité totales ? Comment cela se traduirait-il, en termes de sensations ?
— Je me sentirais calme, sans doute. Tranquille. En paix.
— Oui.
— Détendue. Optimiste. Disponible. Libre.
— Et dites-moi, ma chère, cela vous arrive-t-il souvent ?
— Probablement jamais.
— Et voilà ! Les gens ne font pas une expérience paisible et tranquille du monde. Nos vies n’ont jamais été si dénuées de menaces physiques immédiates, et pourtant nous ne nous sommes jamais sentis aussi menacés. Et ce parce que, au quotidien, avec toutes les responsabilités qui nous incombent, au travail, en famille, pris dans le tourbillon d’informations, de nouvelles, de tendances et de baratin, face aux millions de choix qui se présentent, face à toutes les horreurs du monde dont la télévision, les ordinateurs et les téléphones nous abreuvent en continu, nous nous sentons surtout anxieux, inquiets, précaires, vulnérables – ce qui n’est pas bien différent de ce que nous ressentirions en cas de vraie famine, ou si nous étions vraiment pourchassés par un lion.
— La surcharge d’informations est le nouveau lion affamé.